Ce qui est bien avec la physique, c’est qu’a conditions égales, les phénomènes observés se reproduisent à l’identique. Prenons le cas du Valiant Lady de la compagnie Virgin, comme le 8 mai dernier il est arrivé tout panache dehors et a encore gagné le prix citron de l’enfumage de l’air de la rade.
Dès son arrivée, il a laissé son empreinte polluante dans l’atmosphère de la presqu’ile de Saint-Mandrier puis dans celle de la petite rade et à quai au port de Toulon. Au port l’inversion thermique atmosphérique a bloqué les polluants issus des gaz chauds issus des moteurs à l’interface des deux couches d’air. Comme vous le savez ce n’est pas la première fois et ce n’est donc pas la dernière fois comme la CCIV l’a annoncé pour les printemps-étés qui viennent !
Ce matin, dès 8h30 l’atmosphère de l’entrée de la petite rade était enfumée par les rejets des gaz d’échappement des moteurs du Valiant Lady de la compagnie Virgin qui se sont dispersés ensuite dans l’atmosphère du littoral (Photographies du Valiant Lady le 22 mai 2023 entre 8h50 et 8h30). Les polluants rejetés ont rejoint la pollution résiduelle stagnant sur la métropole toulonnaise. Après le passage du Valiant Lady, un nuage stagnait au niveau des collines du village de Saint-Mandrier (Photographie du 22 mai 2023 à 8h37).
Arrivé à quai à Toulon, sous l’effet de la chaleur des gaz rejetés le panache s’est élevé verticalement au-dessus de la ville se dirigeant et se dispersant ensuite dans l’atmosphère des quartiers Est de la Métropole en direction de la Seyne (Photographies du Valiant Lady le 22 mai 2023 entre 8h45 et 10h30).
Vers 9h54, sur fond de panache du Valiant Lady, le sous-marin nucléaire d’attaque Le Perle quittait l’atmosphère pollué de la rade (Photographie du 220523 à 9h00), suivi du Corsica Marina Seconda de la Corsica Ferries qui lui, à propulsion thermique au fuel lourd, rajoutait les polluants de son panache bien noir (Photographie du Corsica Marina Seconda du 22 mai à 18h58 et 11h04), juste avant que ceux du panache du Pascal Lota ne se dispersent à leur tour dans l’atmosphère de la rade (Photographies du Pascal Lota le 22 mai 2023 à 11h41). Le panache du MSC Magnificat entrant dans la rade pour aller à quai à la Seyne sur mer faisait alors, bien que, pale figure à côté des précédents (Photographie du MSC Magnificat le 22 mai 2023 à 12h04) …
Les résultats de mesure enregistrés ce matin 22 mai 2023 par les équipements de la station Atmosud de Toulon montrent des valeurs maximales de 63,0 et 69,7 µg/m3 pour le dioxyde d’azote (NO2) respectivement à 8h15 et 10h45 ainsi qu’un pic de microparticules de diamètres inférieurs à 2,5 micromètres atteignant 29,1 µg/m3 entre 10h et 11h.
Les résultats de mesure enregistrés ce même matin avec 2 capteurs citoyens, l'un implanté à Toulon (nebuleair-015) l'autre implanté à Saint Mandrier (nebuleair-018) montrent également une augmentation significative de la pollution. Voir à ce sujet cet article Var Matin.
Un drone a-t-il fait des mesures des polluants comme le dioxyde de soufre pour rassurer les habitants de la métropole, des mesures ont-elles été réalisées pour quantifier la pollution des eaux marines de surface dans le cadre du fameux Contrat de baie ?
Pour rappel les seuils de référence recommandés par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) en 2021 pour NO2 sont 25 µg/m3 et 10 µg/m3 respectivement pour 24 heures et sur l’année et pour les PM2.5 de 15 µg/m3 et de 5 µg/m3 respectivement pour 24 heures et sur l’année.
Pour en savoir plus :
- L'insoutenable pollution de l'air du transport maritime
- Fourth Annual Report from the European Commission on CO2 Emissions from Maritime Transport (period 2018-2021) publié le 13 mars 2023
L’électrification des quais des ports de Toulon ne résoudra pas les pollutions atmosphériques dues aux rejets des navires équipés de moteurs diesel anciens et fonctionnant aux combustibles lourds dits « marines » lors de leur transit dans la rade. L’alternative n’est pas non plus à rechercher dans l’utilisation de scrubbers ouverts qui rejettent les polluants issus du lavage des gaz de combustion directement dans les eaux de mer.
En cette soirée du 16 mai, l’effet d’une petite brise d’est (24 km/h) rabat vers les quais le panache des gaz de combustion rejetés par les moteurs du Mega Express Three encore à quai. Les polluants vont donc se disperser dans l’atmosphère proche contaminant l’air respiré par les personnes à proximité. Les stations de contrôle de la qualité de l’air, trop éloignées de cette zone ne mesureront aucun élévation des polluants (Photos du Corsica Ferries Mega Express Three le 16 mai 2023 à 20h07).
Vingt minutes plus tard, le Mega Express Three croise le Mega Regina de la même compagnie provenant de Corse en approche dans la rade. Leurs deux panaches se disperseront, toujours sous l’effet du vent d’est, en direction de la Seyne sur mer (Corsica Ferries Mega Express Three et Mega Regina le 16 mai 2023 à 20h25).
Le Mega Express Three « met les gaz » bien noirs pour sa destination Corse (Ajaccio) en sortie de la petite rade devant Saint-Mandrier (Photo du Corsica Ferries Mega Express Three le 16 mai 2023 à 20h29).
Les perspectives sont inquiétantes, le transport maritime devrait continuer à se développer et, sans action soutenue pour réduire les pollutions associées, ses émissions de GES devraient augmenter jusqu'à 50 % d'ici 2050. Ce développement est effectivement confirmé par les annonces des compagnies.
La baisse nécessaire de l’impact des rejets des navires sur la santé et l’environnement, comme cela a été le cas pour celui des voitures, passera donc inévitablement par la rénovation de la flotte. Les vieux rafiots doivent être remplacés par des navires avec des propulsions utilisant des carburants alternatifs moins polluants ou des énergies innovantes avec la mise en place d'infrastructures adaptées dans les ports (par exemple GNL). Il est donc urgent de développer des ferries entièrement électriques ou alimentés par de l'hydrogène provenant de sources renouvelables locales, la propulsion des navires assistée par le vent, etc. avec pour objectif le zéro émission.
Santé publique France le martèle dans ses publications sur les effets sur la santé de la pollution atmosphérique : « si la mortalité liée à la pollution de l'air ambiant présente une tendance à la baisse, elle demeure un facteur de risque conséquent en France et les efforts de réduction de la pollution de l'air ambiant doivent par conséquent être poursuivis durablement pour toutes les sources de pollution avec une transition adaptée mais néanmoins ambitieuse ».
Le panache de polluants (NO2, SO2, CO2, PM2,5, PM10, métaux lourds, etc.) rejetés quotidiennement par les moteurs des navires des ferries et des croisiéristes continue à polluer l’air que nous respirons et les eaux marines méditerranéennes (Photos du Corsica ferries Mega Smeralda, le 13 mai 2023 entre 18h00 et 19h43, du Corsica ferries Mega Regina le 15 mai 2023 à 6h32, du MSC Magnifica le 15 mai à 19h30 dans le soleil couchant parti du port de Toulon pour celui de Gènes en Italie, du Corsica ferries Mega Express le 16 mai 2023 à 6h50 à son arrivée et au port de Toulon).
Santé publique France tire également les enseignements du confinement du printemps 2020 lié à la Covid-19 qui ont montré l’importance de l’influence du trafic routier dans les zones urbaines et la modification des modes déplacement (modes doux : marche et vélo).
« La limitation des activités pendant le confinement au printemps 2020 a entraîné une réduction de l'exposition de la population française au NO2 et aux PM qui a permis d'éviter environ 2 300 décès en lien avec les PM2,5 et près de 1 200 en lien avec le NO2 sur la période de juin 2019 à juillet 2020 » … « Cette étude estime a posteriori les conséquences sur la mortalité des baisses de la pollution de l'air ambiant observées durant le premier confinement au printemps 2020 en France métropolitaine. Elle constitue une nouvelle illustration confirmant que, dans un contexte inédit qui n'est certainement pas réaliste ni souhaitable pour améliorer la qualité de l'air à long terme, les mesures d'actions publiques apparaissent comme un levier efficace pour réduire les niveaux de pollution, et donc l'exposition de la population et ses répercussions sur la santé ».
Concernant les mesures d'actions publiques, à l’occasion du 1er comité ministériel qui s'est tenu le 25 octobre 2022 sur les zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m), le gouvernement a annoncé de nouvelles mesures pour lutter contre la pollution de l’air dans les agglomérations :
- Développer les zones à faibles émissions mobilité d’ici 2025 ;
- Réduire la pollution atmosphérique dans les zones portuaires ;
- Accompagner les collectivités dans le déploiement des ZFE-m ;
- Accompagner les ménages pour acquérir des véhicules plus propres…
Allez Mesdames, Messieurs des collectivités locales, soyez fous, ayez un peu d’ambition pour la mise en place de la Zone à faibles émissions de la Métropole Toulon-Provence-Méditerranée, il en va de la santé de ses habitant.es !
Pour en savoir plus :
- Santé publique France, Rapport et synthèse Impact de la pollution de l’air ambiant sur la mortalité en France métropolitaine.
Textes de loi et références :
- Loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités ;
Quelques photos de la pollution aérienne stagnant sur Toulon ce matin du 9 mai 2023.
Et le passage du voilier de la fondation ARSEP, association pour la recherche sur la sclérose en plaques, pas une fumée ne s'échappe de ce trimaran. Quel contraste entre les pollueurs et les victimes de la pollution ! Le voilier de la fondation est de passage à La Seyne, voir ce lien.
Les publications sur la survenue des poussées de sclérose en plaques ayant pour origine les particules fines sont nombreuses, citons entre autres:
- Pollution atmosphérique et déclenchement de poussées de sclérose en plaques, investigation au niveau individuel par Maxime Jeanjean, Thèse de doctorat en Santé publique
- La survenue de poussées de sclérose en plaques influencée par le niveau de particules fines PM10 dans l’air, Emmanuelle Leray et al.
Aujourd’hui, c’est le Valiant Lady de la compagnie Virgin qui a gagné le prix citron de l’enfumage de l’air de la rade. Dès son arrivée, il a laissé son empreinte polluante dans l’atmosphère de la presqu’ile de Saint-Mandrier puis dans la petite rade et à quai au port de Toulon. Ce n’est pas la première fois et du coup les panaches des navires de la Corsica Ferries faisaient pale figure !
Ce matin, dès 7h30 l’atmosphère de la rade était enfumée par les rejets des gaz d’échappement des moteurs du Valiant Lady de la compagnie Virgin qui se sont dispersés dans l’atmosphère de la rade. Un petit vent d’est a d’abord dispersé les fumées vers les quartiers ouest de la Métropole en direction de la Seyne sur Mer, puis vers 8h30, suite à l’inversion de la direction du vent, le panache après s’être élevé verticalement s’est dirigé vers les quartiers est de la Métropole. La hauteur du panache correspondant à la hauteur des immeubles à l’ouest des quais… Un drone a-t-il fait des mesures des polluants pour rassurer les habitants de ces immeubles ? (Photographies du Vaillant Lady le 8 mai 2023 entre 7h50 et 8h30).
Vers 9h30, c’est le Maga Regina de la Corsica Ferries quittant la rade pour la Corse qui libérait ses polluants dans l’atmosphère (Photo du Mega Regina de la Corsica Ferries le 8 mai à 8h34).
Certes les articles de l’Annexe VI de la Convention MARPOL adoptée en 1972, ont été transposés en droit français dans l’arrêté du 23 novembre 1987 relatif à la sécurité des navires, imposant des limites de plus en plus strictes pour les émissions d’oxydes de soufre (SOx), principaux précurseurs des particules fines. Après une baisse à 0,5 % de la teneur en soufre des combustibles marins au 1er janvier 2020, au niveau européen, la directive consolidée 2016/802 a abaissé la teneur en soufre à 0,1 % pour les navires à quai lors d’une escale de plus de deux heures. Ce 0,10 % sera obligatoire dans la future zone SECA en Méditerranée mais il faudra attendre 2025, et espérer que les scrubbers seront également bannis des navires afin de ne pas transférer les polluants atmosphériques directement dans les eaux marines.
Évolution des émissions de CO2 par type de navire et différenciée par type de voyage et à quai (at berth) ; Différence entre 2021 (hors Royaume-Uni) versus 2020. Les types de navires ont été triés par variation de leurs émissions totales déclarées. Il apparait sur le graphique que les rejets de CO2 des navires de croisières ont déjà augmenté significativement, plus de 1000 kt, pour les croisières intracommunautaires dont un grand nombre en Méditerranée (flèche). Tout cela promet pour cet été où il est annoncé une flambée de navires de croisière. Source : Fourth Annual Report from the European Commission on CO2 Emissions from Maritime Transport (period 2018-2021).
Pour autant et en attendant, question pollution atmosphérique quotidienne, les fumées des navires qui ont transité dans la rade continuent à parler d’elles-mêmes ! Mais quelles sont les teneurs des polluants de ces fumées ? En 2022, la Direction interrégionale de la mer Méditerranée (Dirm Med) indiquait que sept navires ont été contrôlés dans le port de Toulon sur les milliers qui transitent chaque année, et annonçait des mesures de CO2, d’oxydes de soufre (SOx) et d’azote (NOx) par drone à venir… parce qu’étonnamment, très souvent, les capteurs d’Atmosud ne détectent pas grand-chose, seraient-ils mal positionnés pour mesurer la pollution atmosphérique des navires ?
Alors que la mise en place de la ZFE-mobilité tarde à se mettre en place à la métropole, la question de l’impact de l’augmentation des rotations des ferries avec leur cortège de véhicules qui embarquent et débarquent en plein cœur de ville est centrale, de même qu’un débat sur la création d’une ZFE-Maritime pour les ports de la rade avec un accès des données de contrôles des polluants accessibles par les citoyens…
Pour en savoir plus :
- L'insoutenable pollution de l'air du transport maritime
- Fourth Annual Report from the European Commission on CO2 Emissions from Maritime Transport (period 2018-2021) publié le 13 mars 2023