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La leçon de Fukushima : le pire n’est jamais à exclure et la confiance n’est pas suffisante.

Assemblée nationale, 28 juin 2018, Commission d’enquête sur la sûreté et la sécurité des installations nucléaires

Lors de la réunion de la Commission d’information du port militaire de Toulon qui s’est réunie ce vendredi 4 mars 2022, les associations représentées ont été informées de la décision de mise à niveau du Plan particulier d’intervention (PPI) concernant les installations nucléaires de base secrète relevant des activité défenses (INBS) du port militaire de Toulon.

Les associations FNE Provence Alpes Côte d'Azur, l’UDVN-FNE83, MART et l’APE demandaient cette révision depuis plusieurs années pour que soit, entre autres, intégrée la commune de Saint-Mandrier, soumise au risque de retombées radioactives sous les vents dominants (Mistral) en cas d’accident nucléaire. En effet, les différentes études d’impact d’un accident nucléaire qu’elles ont réalisées montrent l’importance des conséquences radiologiques prévisibles de rejets radioactifs dans l’atmosphère et dans les eaux suite à un accident nucléaire d’un navire à propulsion nucléaire ou d’une installation nucléaire à terre, en particulier sur la commune de Saint-Mandrier. Elles préconisaient en particulier l’extension du périmètre du PPI et de pré-distribution d'iode stable, conformément aux recommandations des autorités européennes de sûreté et de radioprotection.

Lors de la réunion, le représentant de la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) a donc informé les associations que le PPI de Toulon sera révisé avec l’élargissement de la zone couverte par le PPI du port militaire.

  • Ainsi, le rayon pour la pré-distribution des comprimés d’iode stable sera porté de 2 à 5 km, voire légèrement au-delà puisque c’est l’ensemble des superficies des communes qui seront concernées dès lors qu’une de leur partie est dans le rayon des 5km.
  • Le PPI couvrira donc l’ensemble du territoire de la commune de Saint-Mandrier ainsi que ceux de La Seyne, Ollioules et Toulon dans leur intégrité.
  • Il a été également annoncé que la zone de mise à l’abri définie par un rayon de 2 km sera transformée en mesure de mise à l’abri reflexe qui sera planifiée sur une zone unique, à 360° autour du point de référence du site, qualifié de forfaitaire, sans attendre dans un premier temps la prise en compte des conditions météorologiques. Cette mesure simplifiera ainsi les 3 zones du PPI actuel.
  • Les mesures d’évacuation seront maintenues à 500 m, voire éventuellement étendues jusqu’à 2 km si l’évolution des conséquences de l’accident le nécessitent.
  • Une plaquette d’information sur les PPI sera prochainement éditée avec une présentation identique pour les sites civils et militaires.
  • Enfin, les plans communaux de sauvegarde de Saint-Mandrier, La Seyne, Ollioules et Toulon devront être révisés.

La nouvelle version attendue du PPI est considérée par les associations FNE Provence Alpes Côte d'Azur, l’UDVN-FNE83, MART et l’APE comme une avancée majeure puisque ce sont maintenant 260 000 habitants, riverains, entreprises et établissements recevant du public des quatre communes de Saint-Mandrier, de La Seyne, d’Ollioules et de Toulon qui bénéficieront des nouvelles mesures de protection.

Pour passer des mots à l’action, l’élaboration concrète de la nouvelle version du PPI est maintenant la préoccupation de nos associations. La préfecture a annoncé un planning de rédaction du nouveau PPI avec à la mi-avril une première réunion pour établir un Comité de pilotage et différents groupes de travail. L’objectif étant de finaliser la révision du PPI en décembre 2022 pour une adoption en février 2023, date à laquelle se tiendra l’Exercice national de sûreté nucléaire et de sécurité civile.

A notre question sur la prédisposition des comprimés d’iode initialement prévue pour juin 2022, il nous a été indiqué que les 4 communes avaient été sollicitées par la préfecture pour connaitre leur besoin.

A notre question sur la participation des parties prenantes que sont nos associations à l’élaboration de la nouvelle version du PPI, il nous a été indiqué qu’elle n’était pas exclue à certains points du planning.

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Les trois zones du PPI version 2012

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Rayons de 2 km et 5 km autour du point géographique de coordonnées GPS du centre de l’installation forfaitaire (Futur PPI révisé)

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Les 4 communes de TPM concernées par le PPI révisé et leur densité de population respective (Source Insee 2018).

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Boîte de 10 comprimés d’iodure de potassium dosés à 65 mg à conserver au frais à l’abri de l’humidité ©IRSN

Pour rappel, le PPI, établi sous l’autorité du préfet, définit l’organisation des secours en cas d’accident dans une INB (installation nucléaire de base), lorsque les conséquences du sinistre sont susceptibles d’affecter les populations et l’environnement. Ce plan est un volet des dispositions du plan ORSEC départemental. Le document décrit les moyens techniques et humains de protection et de secours, leur organisation ainsi que l’information en direction du public en cas d’alerte d’accident nucléaire dans un rayon autour du site de l’INB.

Le PPI approuvé en 2012, sera donc modifié pour renforcer la protection radiologique des habitants vivant dans les communes riveraines du port militaire en situation d’accident. Cette évolution fait suite à celle des PPI des centrales nucléaires productrices d’électricité (CNPE) d’EDF pour tenir compte des leçons tirées de l’accident de Fukushima par les Autorités de sûreté nucléaire. Les principales évolutions portent notamment sur la planification d'une nouvelle mesure d'évacuation « immédiate » dans un rayon de 5 km autour des CNPE et l'extension des rayons des périmètres des PPI de 10 à 20 km pour ces installations.

L’ingestion de comprimés d’iode stable, généralement sous la forme d’iodure de potassium, est l’une des trois mesures du PPI avec la mise à l’abri et l’évacuation des populations.

En effet, en cas d’accident nucléaire, le rejet dans l’atmosphère d’isotopes radioactifs de l’iode peut avoir des conséquences sanitaires sur les personnes qui les inhalent avec l’air qu’elles respirent ou les ingèrent avec de la nourriture contaminée. Les isotopes radioactifs incorporés se fixent ensuite dans la glande thyroïde qu’ils irradient, augmentant le risque de développer un cancer de la thyroïde, en particulier chez les enfants comme cela a été observé en Ukraine à la suite de l’accident de Tchernobyl.

L’ingestion de comprimés d’iode stable une heure avant que les personnes soient exposées et au plus tard dans les 6 à 12 heures qui suivent la contamination permet de saturer la thyroïde qui, ainsi, ne peut plus assimiler les isotopes radioactifs d’iode. Evidemment l’ingestion d’iode stable ne protège pas contre les effets des autres éléments radioactifs qui pourraient être libérés dans l’environnement (césium 134, césium 137, etc.).

C’est le préfet qui décide d’informer les personnes susceptibles d’être contaminées par les rejets d’isotopes radioactifs d’iode de la prise des comprimés d’iode stable qui ont été prédisposés dans les communes couvertes par le PPI.