Les semaines passées, l’atmosphère de notre littoral s’est légèrement colorée en jaune à différentes reprises comme le 6 février dernier. La cause de ce phénomène réside dans la remise en suspension de fines particules de sable du désert saharien lors de tempête de sable pour être ensuite transportées par des vents issus du Sahara qui ont finalement traversés l’Europe.

ACRO cropped logo1L’Association pour le contrôle de la radioactivité dans l’ouest (Acro) a récolté les dépôts de ces poussières pour réaliser des mesures de radioactivité par spectrométrie gamma. Les résultats de ces analyses montrent que ces dépôts contiennent des traces de Césium-137, un radionucléide caractéristiques des essais d’explosions d’engins nucléaires réalisées dans l’atmosphère et des accidents nucléaires, comme ceux de Tchernobyl et Fukushima.

Compte tenu de l’origine des vents, l’Acro relie ces apports atmosphériques aux essais d’explosions d’engins nucléaires réalisés par la France dans le Sahara algérien, voir cet article

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Circulation des vents le 6 février 2021
à 13h00 UTC (http://Windy.com)

Image SAT24 prise le 6 février 2021
à 13h00 UTC (http://www2.sat24.com)

En effet, les essais Gerboise (Bleue, Blanche, Rouge and Verte) réalisés par la France en 1960 – 1961 sur le Centre saharien d’expérimentations militaires (CSEM), proche de l’oasis de Reggane, ont conduit à la contamination de l’environnement par dépôts de particules radioactives présentes dans les retombées. Ainsi, les niveaux résiduels des essais sur les zones d’explosions des expérimentations ont été réévalués en 1999 et atteignaient un maximum de 6.0 MBq/m2, soit 6 000 000 Becquerel/m2 (site de l’essai Gerboise blanche).

 Premier essai nucléaire d'explosion atmosphérique Gerboise bleue le 13 février 1960 (Dalmas SIPA)

Photo : Premier essai nucléaire d'explosion atmosphérique "Gerboise bleue" le 13 février 1960. (Dalmas/SIPA)

Les particules radioactives déposées à la surface des sols peuvent être remises en suspension et transportés par les vents à de très grandes distances, à plus de 10 000km. Dans le passé, en 2004, des apports sahariens en césium-137 importants ont déjà été mesurés en France. Pour ce dernier épisode, l’Acro a estimé les dépôts de césium-137 à 80 000 becquerels par km2, soit 0,08 Bq/m2.

L’impact sanitaire de ces nouveaux apports est considéré comme négligeable. En effet, l’estimation de ces dépôts radioactifs est à mettre en perspective avec les niveaux en césium-137 mesurés dans les sols français qui fluctuent aujourd’hui entre moins de 3 000 Bq/m2 à plus de 10 000 Bq/m2 très localement dans les Alpes. Ces derniers niveaux s’expliquent principalement par les retombées de l’accident de Tchernobyl en mai 1986, majoritairement plus importantes dans ces zones que celles des essais réalisés dans l’atmosphère de l’hémisphère nord par les cinq puissances nucléaires.

Le césium-137 à une période radioactive de 30 ans, aussi sa radioactivité décroit de moitié tous les 30 ans et ce radionucléide finira donc par disparaître par décroissance radioactive en l’absence de tout nouvel apport. En attendant il peut être utilisé comme un traceur de nombreux processus naturels.

Pour en savoir plus sur les essais d’expérimentation au Sahara : Radiological Conditions at the Former French Nuclear Test Sites in Algeria: Preliminary Assessment and Recommendations. et sur le transport des particules: Long-range transport of Saharan dust to northern Europe: The 11-16 October 2001 outbreak observed with EARLINETEurope: The 11-16 October 2001 outbreak observed with EARLINET