Les constatations du suivi environnemental effectué par des membres plongeurs de L’Association pour la protection des sites et du littoral du Brusc et de la presqu'île du cap Sicié sont confirmées par un huissier de justice qui a plongé sur le site de Port Méditerranée : les grandes nacres (Pinna nobilis) ont disparu, les herbiers de posidonies et de cymodocées sont détruits ou abimés par les rochers et gravats immergés lors des opérations de remblayage. Le constat environnemental est donc sévère.
Ce n’est malheureusement pas une surprise. Les posidonies, cymodocées ainsi que les grandes nacres (Pinna nobilis), espèces protégées présentes dans la zone de Port Méditerranée jusqu’au Brusc, sont fortement menacées, ainsi que leur habitat et ce depuis des années, par de nombreuses agressions liées aux activités anthropiques : tourisme, remblai, port de plaisance, pêche, réensablement des plages.
Le port en cours de construction est adossé à la zone rocheuse de la pointe du cap Négre (qualifiée de zone natura 2000/znieff2/ espace remarquable). L’étude d’impact initiale associée au projet d’extension du port Méditerranée avait pourtant bien identifié la présence de ces trois espèces protégées. Leur protection nécessitait donc une application rigoureuse des méthodologies du suivi environnemental (Arrêté Préfectoral du 28 août 2013) afin de permettre de suivre l’évolution spatio-temporelle de ces espèces protégées sous les effets combinés des actions anthropiques décrites dans cette zone, en particulier lors de la construction des digues de protection du nouveau port.
L’APLBS et l’Union Départementale du Var pour la sauvegarde de la Vie et de la Nature (UDVN 83) ont suivi ce projet d’aménagement depuis l’origine et se sont naturellement inquiétées du respect de l’arrêté préfectoral. Malheureusement, malgré des recours au tribunal administratif et de nombreuses demandes réitérées auprès de la commune, les rapports mensuels de suivi de l’impact sur les herbiers de phanérogames et des nacres ne leur ont jamais été transmis.
Ce jeudi 16 janvier, c’est donc un huissier qui a plongé sur le site du projet pour constater l’absence de balisage de la limite des herbiers et vérifier visuellement l’état des espèces protégées. L’absence de balisage des limites des herbiers constaté par l’huissier est un manquement grave puisqu’il est indispensable pour vérifier les effets des immersion des rochers et gravats sur la « santé » des herbiers. D’autre part, puisque les herbiers régressent, le balisage délimite les surfaces minimales où doivent être mise en place des mesures correctives, comme la transplantation de boutures sur la matte morte telle que cela est requis par l’arrêté préfectoral (L’huissier plongeant sur le site à 2.30 minutes du début du reportage FR3).
Exemple de protocoles de mise en place des balises pour suivre l’évolution des limites des herbiers (GIS-Posidonie-RSP, in Charbonnel et al., 2000).
Deux types de balises peuvent être utilisées et sont représentées sur la figure : soit de type plot en béton, soit de type borne de géomètre. Elles sont ancrées dans le sédiment et localisées par un flotteur pour être facilement repérables au cours du temps. Des photos sont prises régulièrement à leur niveau pour cartographier l’évolution au cours du temps des limites des herbiers.
La protection de toute surface d’herbier est essentielle aujourd’hui. En effet, au cours des dernières décennies, une régression quasi-généralisée de l’herbier de posidonie sur le littoral nord occidental de la Méditerranée a été constatée. Son recul a été essentiellement observé aux abords des agglomérations et des grands centres industriels et portuaires. Ainsi, à Marseille et à Toulon c’est près de 90% de l’herbier qui a disparu (lien vers notre fiche action Posidonie sur Sainte-Asile).
Pour en savoir plus :
Boudouresque C.F., 1996. Impact de l’homme et conservation du milieu marin en Méditerranée. 2ème édition. GIS Posidonie publ. (ISBN 2 905-54-21-4) : 1-243.
Belsher T., Houlgatte E., Boudouresque C.F., 2005. Cartographie de la prairie à Posidonia oceanica et des principaux faciès sédimentaires marins du Parc national de Port-Cros (Var, France, Méditerranée). Sci. Rep. Port-Cros natl Park, 21 : 19-28+carte h.t.
Boudouresque C.F., Bernard G., Bonhomme P., Charbonnel E., Diviacco G., Meinesz A., Pergent G., Pergent-Martini C., Ruitton S., Tunesi L., 2012. Protection and conservation of Posidonia oceanica meadows. RAMOGE and RAC/SPA publ., Tunis : 1-202