La Russie se retire du traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICE) qu’elle avait signée le 24 septembre 1996 et ratifiée le 30 juin 2000.

En effet, le Conseil de la Fédération, chambre haute, a approuvé le 25 octobre à l'unanimité le projet de loi concernant le retrait de la Russie que la Douma, chambre basse, avait adopté lors d'un vote accéléré la semaine précédente. Cette loi n’a plus besoin que de la signature du président Vladimir Poutine pour entrer en vigueur.

La presse avait reporté la déclaration du président Poutine le 5 octobre : « J’entends des appels pour commencer à tester des armes nucléaires. Je ne suis pas prêt à dire si nous devons réellement procéder à des tests ou non ».  Le gouvernement russe avait annoncé dans la foulée le 6 octobre son intention de retirer sa ratification du traité pour en être uniquement signataire, c’est à dire au même niveau que les États-Unis qui ont également signé le TICE le 24 septembre 1996 mais sans jamais le ratifier bloquant ainsi son entrée en vigueur.

Le vice-ministre des Affaires étrangères Sergueï Ryabkov a cependant déclaré début octobre que Moscou continuerait à respecter l'interdiction et ne reprendrait les essais nucléaires que si les États-Unis le faisaient.

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Cette position a été confirmé par l’ambassadeur russe auprès de l’Organisation du TICE (Message sur X).

Il est à noter que, quelques heures après l’annonce russe, les États-Unis ont procédé le 18 octobre 2023 à une expérience utilisant des explosifs chimiques puissants et des radiotraceurs dans le tunnel P de la zone 12 du site de sécurité nationale du Nevada, anciennement connu sous le nom de Nevada Test Site où les Etats Unis ont procédé à plus de 1000 essais nucléaires. 61 essais nucléaires ont d’ailleurs été réalisés dans cette zone 12 entre 1957 et 1992.

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Le tunnel P dans la zone 12 du site de sécurité nationale du Nevada (Crédit NNSS).

Le Secrétaire général des Nations Unies à précisé que « Depuis l’adoption du Traité, la Russie a joué un rôle de premier plan dans la recherche de l’entrée en vigueur du TICE. Il est inquiétant de constater un renversement de cette tendance ».

A ce jour 187 pays ont signé le TICE et 178 l’ont ratifié. Pour que le TICE entre en vigueur, il doit encore être ratifié par huit États sur une liste de 44 définis comme détenteurs de technologie nucléaire à l'annexe 2 du Traité, à savoir Chine, RPDC, Égypte, Inde, Iran, Israël, Pakistan et États-Unis). États, auquel il faut donc maintenant rajouter la Russie. La France a signé le TICE le 24 septembre 1996 et l’a ratifié conjointement avec le Royaume uni le 6 avril 1998 après un dernier essai souterrain (Xouthos) le 27 janvier 1996 à Fangataufa.

Le TICE interdit les explosions nucléaires par tous les pays et partout : au-dessus du sol, sous l’eau et sous terre. C’est un élément essentiel du cadre international de contrôle des armements nucléaires et de désarmement. En effet, les essais nucléaires constituent une étape clé dans le développement des armes nucléaires. En y mettant fin, le TICE freine toute prolifération des armes nucléaires, qu’il s’agisse du développement d’armes nucléaires par des pays qui n’en possèdent pas actuellement, de la modernisation des arsenaux nucléaires actuels ou de la création de nouvelles générations d’armes nucléaires plus avancées.

Le TICE entretient une relation intrinsèque et complémentaire avec le Traité historique sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), pierre angulaire du régime mondial de non-prolifération et de désarmement nucléaire, qui reconnaît l’importance cruciale de mettre fin aux explosions nucléaires expérimentales.

Le TICE prévient également les graves conséquences des essais nucléaires sur la santé et l’environnement.

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