Il faut croire que l’humour involontaire a encore de beaux jours devant lui. Comme l’an dernier, pour promouvoir la bouillabaisse locale, notre commune a eu l’idée lumineuse d’utiliser l’image d’un poisson… venimeux, envahissant et classé espèce préoccupante par les scientifiques : le Pterois miles, alias le poisson-lion. Un chef-d’œuvre de communication locale !

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Car ce poisson aux nageoires spectaculaires, s’il en impose visuellement, n’a rien à faire dans une marmite provençale. En réalité, il incarne une menace sérieuse pour la biodiversité marine méditerranéenne, et n’est certainement pas un ingrédient pour votre assiette.

Un intrus venu du canal de Suez

Originaire de la mer Rouge, Pterois miles a traversé le canal de Suez pour s’installer en Méditerranée. Et il ne fait pas que de la figuration : ce prédateur glouton dévore tout ce qui bouge autour de lui, mettant en péril les écosystèmes côtiers. Il s’étend désormais rapidement vers l’ouest et pourrait atteindre les eaux françaises d’ici peu.

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Les années et les lieux où les poissons-lions ont été observés pour la première fois confirment une expansion de leur aire d’invasion en Méditerranée. Les premiers signalements dans le nord de la mer Égée, la mer Ionienne et l’Adriatique méridionale remontent à la période 2020–2022. Des individus ont également été observés en Sicile, en Sardaigne, en Croatie et à Malte, mais uniquement au cours des années les plus récentes. Cela suggère que ces poissons-lions observés ne sont probablement pas échappés d’aquarium ; si tel était le cas, on s’attendrait à des signalements plus anciens. Il est plus vraisemblable que ces individus aient été transportés par de forts courants depuis l’est de la Méditerranée, soit sous forme de larves, soit sous forme d’œufs (source).

Mais pas d’inquiétude pour votre bouillabaisse sauf si vous avez un goût prononcé pour le risque dans sa préparation… ou pour l’ironie locale.

Un poisson pas très convivial

Avec ses 18 épines venimeuses, il inflige des piqûres extrêmement douloureuses pouvant provoquer œdèmes, nausées ou vertiges. Rien de très festif, donc.

Dommage pour l’image d’un déjeuner censé réunir convivialité, tradition et gastronomie.

Une vigilance bien plus utile que l’autodérision

Loin des affiches fantaisistes, les scientifiques prennent la menace très au sérieux. Car si l’on ne fait rien, l’histoire des Caraïbes risque de se répéter chez nous : des écosystèmes comme les herbiers appauvris, une biodiversité effondrée, et une espèce invasive devenue impossible à contenir.

Pterois miles, ce n’est pas une recette, c’est un signal d’alerte pour la Méditerranée.

Alors si un jour vous en apercevez un dans nos eaux :

  • Ne le touchez pas !
  • Prenez une photo, localisez-le, et
  • Signalez-le à l’APE (This email address is being protected from spambots. You need JavaScript enabled to view it.).

Le Pterois miles n’a rien d’un rouget ni d’une rascasse, il se signale. Et surtout, il ne fait pas une bonne affiche pour une bouillabaisse… sauf peut-être dans un sketch.

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