Auriez-vous appuyé sur le bouton nucléaire ?

Les va-t-en-guerre sont nombreux aujourd’hui, pensant être protégés par les armes dites de dissuasion nucléaire dont disposent la France.

Il y a 80 ans, le 6 août 1945 à 8h12, la première bombe atomique utilisée en temps de guerre explosait au-dessus d’Hiroshima, causant la mort de 100 000 à 140 000 personnes. Trois jours plus tard, le 9 août, le bombardement de Nagasaki faisait entre 60 000 et 70 000 morts.

Ces deux attaques ont anéanti respectivement 13 km² et 6,7 km² de ces deux villes, dont plusieurs kilomètres carrés entièrement détruits par une tempête de feu. Les survivants en ont gardé des séquelles physiques et psychologiques pour le reste de leur vie.

Pour mémoire, trois semaines auparavant, le 16 juillet 1945, les États-Unis réalisaient au Nouveau-Mexique le premier essai nucléaire de l’histoire. Le président Truman écrivait alors :

« Nous avons découvert la bombe la plus terrible de l’histoire du monde. »

Pourtant, le 21 juillet, il donnait l’ordre de bombarder deux villes japonaises avec cette nouvelle arme.

Mais il ne faut pas oublier non plus le bombardement de Tokyo, dans la nuit du 9 au 10 mars 1945 : l’opération Meetinghouse. Ce raid aérien au napalm fut le plus meurtrier de la Seconde Guerre mondiale. En une nuit, un tiers de la ville fut réduit en cendres (40 km², soit quasiment la superficie de Toulon) et plus de 95 000 personnes périrent.

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Hiroshima le 6 août 1945, quelques minutes après l'explosion de la bombe (à gauche). Photo prise et annotée de la main du pilote Paul Tibbets (Source Wikimedia commons) et les décombres actuels du dôme de Genbaku (à droite), à l'origine le palais d’exposition industrielle de la préfecture d'Hiroshima. Ils ont été conservés pour devenir le mémorial de la paix d'Hiroshima en tant que restes du seul bâtiment encore érigés à proximité de l’hypocentre de l’explosion de la bombe atomique.

Dans tous ces cas, ce sont essentiellement des populations civiles qui ont été touchées, bien que des objectifs militaro-industriels aient été visés.

Les deux bombardements atomiques, combinés à l’entrée en guerre de l’Union soviétique contre le Japon en Mandchourie le 9 août, ont conduit à la reddition sans condition du Japon le 10 août 1945, mettant fin à la Seconde Guerre mondiale.

Une menace encore bien présente

Depuis plusieurs mois, la menace d’un recours à l’arme nucléaire a ressurgi, notamment à travers les discours du président Poutine. Il n’existe pas à proprement parler de « bouton nucléaire », mais la possibilité d’un déclenchement reste bien réelle. L’arme nucléaire continue de façonner les rapports de force mondiaux.

Pendant la guerre froide, les États-Unis et l’URSS avaient adopté une doctrine dite de « destruction mutuelle assurée » : si l’un attaquait, l’autre ripostait, entraînant l’anéantissement des deux. Ainsi, faire croire à l’adversaire qu’on est prêt à appuyer sur le bouton nucléaire pouvait suffire à maintenir une paix instable, en entretenant une peur permanente.

La formule Reagan-Gorbatchev toujours d’actualité ?

« Une guerre nucléaire ne peut être gagnée et ne doit jamais être menée. »

Cette déclaration historique a été formulée en 1985 lors du sommet de Genève entre Ronald Reagan et Mikhaïl Gorbatchev. Elle marquait un tournant, à une époque où les tensions nucléaires étaient vives, mais où s’engageait un processus de dialogue et de désarmement.

Depuis, cette formule a été réaffirmée en 2020, d’abord par Biden et Poutine, puis par Poutine et Xi Jinping.

Pourtant, 40 ans plus tard, le désarmement stagne, voire recule. Les discours rassurants sur la dissuasion nucléaire garantissant la paix sont toujours prononcés… mais avec une re-nucléarisation politique justifiant la modernisation accélérée des arsenaux. L’avenir du désarmement dépend désormais d’un nouvel engagement fort des grandes puissances… et de la pression de la société civile.

Et si cela arrivait ici ?

La doctrine de dissuasion repose sur une menace de représailles nucléaires, censée décourager toute agression. Et si cela n’était plus le cas ?

Image explosions 20 kt et 10kt VF

Une simulation théorique (outil Nukemap) a permis d’illustrer les conséquences d’une explosion nucléaire de 20 kilotonnes, puissance équivalente à celle de la bombe de Nagasaki, à 500 mètres d’altitude au-dessus du secteur militaire de Toulon (cf. carte de gauche). Les estimations sont édifiantes : 15 000 morts, plus de 65 000 blessés. D’importants dégâts matériels dans un rayon de plusieurs kilomètres. Une attaque utilisant plusieurs armes de plus faible puissance (10 kt), explosant au sol sur des cibles multiples, entraînerait également des conséquences dévastatrices pour toute la région (cf. carte de droite). À noter : l'effet de relief (mont Faron) accentuerait encore les dégâts.

Ainsi, dans les faits, les zones stratégiques comme Toulon, premier port militaire de France, seraient ciblées en priorité par notre adversaire en cas de guerre nucléaire. Alors, appuierez-vous sur le bouton nucléaire ?

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